Re-confinée?
Batailles choisies #177
En deux mots:
Whatsapp tinte frénétiquement. L’ensemble de la région centrale, dont la ville où je vis au Chili, régresse dans les phases de déconfinement et fait un pas vers le reconfinement.
Non. Non, par pitié.
Tout me revient en flash d’horreur, les journées entières avec les enfants, les heures infernales avec Petit, à essayer de ne pas perdre patience, la haine que j’ai ressentie pour lui, l’autre, pour eux tous, qui jamais, jamais, ne me laissent tranquille. Je revois le mari enfermé dans le bureau, les tâches ménagères qui s’accumulent, l’épuisement, la bataille quotidienne pour trouver du temps pour moi.
Non, par pitié.
Pour tenir, je m’accrochais à cette fin d’année, à cet été qui est presque là, dans l’espoir de nettoyer toutes les toxiques d’une année terrible. La crèche a réouvert, il ne reste plus que deux semaines avant les grandes vacances, on a réussi à retrouver la joie de vivre en famille avec un espace et un temps pour chacun.
Et la menace de revivre, moi qui croyais pouvoir respirer, cette année où je me suis sentie si prisonnière d’une famille qui n’était plus que geôlière, alors que je suis dans mon troisième trimestre de grossesse, revient avec une force terrifiante!
L’impression qu’alors que je sors la tête de l’eau, on me replonge dans la mer déchaînée. Ou que la bouée jetée est juste un peu trop loin.
Que la cavalerie promise, (mes parents qui doivent venir pour l’été, mais la situation sanitaire est si incertaine!), n’arrive en fin de compte, jamais.
La menace que je me retrouve pratiquement seule avec un enfant de cinq ans, un de deux ans et demi et un nourrisson est donc bien réelle. Rien ne me dit que je vais y échapper. Et comment vivre une fin de grossesse sereine avec ça, comment m’atteler à mes projets d’écriture que j’ai continués d’arrache-pied malgré tout, fleurs de cactus, dans un tel océan d’anxiété, courants glacés et chauds se mêlant, peurs et larmes que je n’arrive même pas à retenir à l’annonce de cette régression?
Après quelques minutes de flambée de panique, j’apprends que les écoles et crèches restent, pour l’heure, ouvertes. Mes espoirs, eux, se tamisent et je prie qu’ils ne s’éteignent pas.