Les abandons
Batailles choisies #180
En deux mots:
Envisager une terrifiante possibilité, merci Covid: être livrée à moi-même à la naissance du dernier et me retrouver avec les trois enfants à gérer seule.
L’angoissant effeuillage de mes espoirs commence.
Je ne demandais qu’un peu de répit après cette année si éprouvante. Un peu de repos, de grandes vacances et de famille joyeuse avant la naissance du troisième et le tourbillon du nourrisson.
Ces espoirs, un par un, me sont enlevés.
Mon mari, il y a quelques mois: pour la naissance, je serai en vacances.
Mon mari, il y a quelques jours: j’ai accepté le nouveau poste, c’est une super opportunité pour nous tous. Par contre, les horaires sont plus lourds et je n’aurai pas de vacances.
Ma sœur, il y a quelques mois: je serai là pour la naissance!
Ma sœur, il y a quelques jours: en fait, je viendrai plutôt en milieu d’année prochaine… et puis avec la pandémie…
Mes parents, il y a quelques mois: début janvier, on est là!
Mes parents, il y a quelques jours: peut-être plus tard dans l’été... en plus avec la pandémie...
Dans un monde où chaque décision est suspendue à l’imprévisible, je ne jette pas de pierre. Mais tous les hasards et toutes les incertitudes nébuleuses de cette année ont fini par prendre corps et devenir mon pire cauchemar, qui me prend à la gorge depuis plusieurs nuits d’insomnie terrible.
Elle est là, de plus en plus menaçante, cette ombre que je croyais passée et qui devient certitude: pas d’école, confinement menaçant, je vais me retrouver seule à m’occuper d’un enfant de 5 ans, d’un de deux et demi, et d’un nourrisson.
Un nuage noir plane au-dessus de moi et les éclaircies sont de plus en plus rares... Il faut pourtant que j’envisage cette terrible possibilité, qui n’est qu’une possibilité, mais que je dois laisser entrer en tempête dans mon esprit.
Héloïse, tant de fois, tu as senti avec la douleur du coup de poignard, que les aides assurées, les belles promesses jurées sur les grands dieux, pouvaient disparaître, évanescentes! Tu as cédé bêtement aux sirènes de l’optimisme...
La vérité nue: je suis seule avec mes enfants et ne peux compter sur personne.