Gueule cassée
Batailles choisies #67
En deux mots:
Je regarde mon cadet dont le corps et le visage sont couverts de gnons.
Petit a un bleu sur la joue gauche. Il a la joue droite râpée, d’une récente gamelle sur un trottoir. Il a une coupure légère sur le menton.
Son front, sur la gauche, porte la cicatrice, fine ligne blanche, d’une chute sur le perron, de la visite aux urgences en résultant, et des cinq points de suture en douloureuse conséquence. Sur la droite, il a une éraflure d’une fois, mais laquelle, où il a trébuché. Au milieu du front, il a une bosse d’une fois, mais laquelle, où il a encore trébuché.
Petit n’arrête pas de tomber, de se cogner, de se faire mal. Sans arrêt. Presque tous les jours. Sur son visage et son corps, il est couverts de bleus, de gnons, de bobos. Quand il se fait mal et qu’on lui demande de montrer le bobo, “montre le bobo, Petit, où as-tu mal”, il montre en veux-tu en voilà, une de ces nombreuses blessures de guerre, sans qu’on sache si c’est la plus récente.
Est-il particulièrement téméraire ? Ou suit-il le rythme imposé par son grand frère?
Depuis aujourd’hui, pour parfaire ce tableau, il a une oreille enflée et rouge, piqûre de fourmi, suppose-t-on.
C’est mon fils cadet, le front variant du bleu au rouge, égratigné, éraflé, griffé, coupé, piqué.
C’est Gueule cassée.
Qu’est-ce qu’il est beau, quand même.