Batailles choisies #686
Recherche Google: “mes enfants m’insultent me disent que je suis bête moche ils me parleront plus jamais s'inquiéter ou pas?”. Et vous, votre soirée? 💔
Bon, c’est moi? C’est moi le problème, alors? Oui, forcément.
Mon fils cadet me traite, m’insulte, me dit que je suis bête, “tonta”. Il ne le fait pas de temps en temps, ni régulièrement, il le fait très souvent. À la moindre frustration ou presque, d’ailleurs, il dégaine son mot préféré: tonto, ou tonta. La porte ne s’ouvre pas? “Tonta porte”, dit-il dans son meilleur fragnol. La balle de ping-pong a roulé sous le canapé, “tonta balle”. C’est un jour d’école aujourd’hui? “Tonto jour d’école”.
Soit. Mais…
Maman demande à ce qu’on porte son sac d’école?
Tonta maman.
Maman exige qu’on débarrasse son assiette?
Tonta maman.
Maman dit qu’il est l’heure d’aller à l’école?
Tonta maman.
Maman dit qu’il faut rentrer, que non, on n’a pas le temps de jouer à la place et que non, on ne peut certainement pas écraser des escargots pour s’amuser.
Tonta maman.
Quel caractère de m** quand même. Mais qu’est-ce que j’ai bien pu faire pour mériter ça! Pas un jour ne passe sans qu’on me tire dessus à insulte réelle, pour un oui, pour un non, pour tout et pour rien, pour quelque chose que j’ai dit ou quelque chose que je n’ai pas dit, pour une interdiction, une pétition ou une autorisation.
Réponse à tout: “tonta”.
Ce mot, unique, absolu. Jeté avec un dédain, avec ses [t] occlusifs lancés comme des grenades dégoupillées, accompagné de bras croisés ou de moue fâchée à mort.
Je vous assure que j’ai tout essayé. J’ai essayé la fermeté: il est hors de question qu’on insulte maman. J’ai essayé l’éducation positive: je comprends que tu sois en colère, mais ce n’est pas ainsi qu’on parle à un adulte. J’ai essayé la surdité passagère: quoi? je n’ai pas entendu mais par contre, tu entends, toi, c’est la sonnerie de la douche-dodo. J’ai essayé de descendre avec lui dans le sable de l’arène: ah bon, je suis tonta, non, c’est toi le tonto de ne pas écouter maman - je ne conseille pas, ce sont de véritables sables mouvants les mesquineries d’une adulte à un enfant. Toujours est-il que j’ai essayé différentes choses, que j’ai tenté diverses approches, avec espoir, patience, exaspération, dépit, et que j’en suis au même point. Avec la brûlure au fer rouge de la honte: j’ai honte de me faire marcher dessus ainsi par mon tyran de fils, honte de ne pas trouver de solution, honte de subir quelque chose que je déteste ainsi. C’est le tripotage de téton sous une autre forme. Une mauvaise habitude de mon cadet, que je porte la culpabilité d’avoir laissé s’installer, sans doute, dont je n’arrive pas à nous débarrasser et qui me fait passer de la fatigue, à l’épuisement nerveux, à l’écoeurement et à la colère noire, dans n’importe quel ordre et de façon imprévisible.
Et Google qui ne me donne que des réponses lues, relues, et archirelues sans que le bout du tunnel ne soit en vue! Patience, ou bien fermeté, ou bien limite, ou bien refus, ou bien psychologue, ou bien désespoir. Rien. Ah si, cet adage bien connu pour les montagnes russes de la vie avec les enfants : try, try, try again.
Ben oui, Tonta, tente, retente, et retente encore.