Batailles choisies #608
J’aime désormais décorer le sapin de Noël. Comme quoi, on n’est jamais à l’abri d’une surprise. 🧑🏻🎄
D’habitude, je souffle d’exaspération anticipée à l’idée de sortir le sapin de Noël. J’ai une réputation de Grinch et tout ce qui est rouge, barbu, chante “ho ho ho” et me fait dépenser de l’argent sur un truc inutile m’exaspère. Chaque année, c’est ainsi. Sortir le sapin de Noël est ma porte des Enfers. Les enfants réclament de le faire alors que j’essaie de repousser au maximum cette entrée dans la joie, histoire que la saison de Noël n’existe dans mon salon que du 22 au 25 décembre, histoire que le bazar ambiant et envahissant (que certains inconscients appellent la magie de Noël, mais qui laissent trop de paillettes et d’épines sur le tapis du salon pour être considéré comme de la magie) que génère nécessairement une famille avec trois enfants ne laisse de trace qu’un temps extrêmement réduit.
Noël et son sapin, d’habitude, j’essaie de mon mieux d’éviter.
Cette année, lorsque les enfants me demandent de faire le sapin, je renâcle bien un peu pour le principe, mais bientôt je lance un enthousiaste bon, ben, allez, si vous voulez.
Et vous savez quoi?
Non, mais j’ose à peine le dire…
C’est tellement loin du Grinch que je suis fière d’être….
Je dois donc l’avouer…
Eh ben voilà: je passe un bon moment.
Un très bon moment, même.
S’est-il passé quelque chose dans ma vie, ou bien dans mon âme, qui m’a transformée en mère Noël? Non, je crois que, comme régulièrement cette année, j’ai trouvé avec soulagement et tendresse, que mes enfants grandissaient.
Cette année, c’est passion sapin.
Cette année, pour la première fois, c’est passion souvenirs.
Sortir le sapin en plastique de sa boîte (j’aime désormais les sapins en plastique, vous aviez oublié?).
Sortir la boîte des décorations de Noël.
Sortir de la boîte les classiques guirlandes lumineuses et musicales de l’Enfer, puis une vingtaine de boules de toutes les couleurs.
Regarder les enfants s’atteler à l'ornement de notre arbre de Noël avec tout le mauvais goût dont ils sont capables.
Sauf qu’aujourd’hui, pour la première fois, je vois avec un plaisir immense et autant de tendresse, les garçons sortir leurs gribouillis de crèche et de maternelle sur le thème de Noël qu’on a rangés dans la boîte, sans doute pour décoration, sans doute parce qu’on ne savait pas où les mettre. Oh, ce rêne au nez rouge fait par Dernier avec une assiette en carton et des gommettes de couleur! Oh, ce pendentif papier en forme de cloche avec les paillettes sur les bords, un peu aplati par le voisinage mais enfin, plutôt mimi! Oh, ce père Noël fait avec un rouleau de papier toilette et des morceaux de papier rouge! Il n’est pas bien catholique, notre sapin, ainsi décoré de toutes les productions maladroites, de tous les travaux multicolores et fatigués, des dessins approximatifs et collages de travers qui pendouillent… mais c’est notre sapin, le nôtre, vraiment celui de notre famille.
Et voilà, on a beau être une maman fatiguée avec un éternel cœur de Grinch… tout de même, on s’attendrit…
Il faut dire aussi que l’attendrissement s’explique par le fait que, maintenant, aucun de mes enfants n’en est à l’âge Tarzan des sapins, où il s’agit de se balancer sur les épines et que je n’ai plus à m’inquiéter de retrouver les boules de Noël dans le baby-foot ou la cuvette des toilettes. De la déco des fêtes, je n’ai plus que les bons moments: profiter de la joie innocente de ses enfants, retrouver les gribouillis mignons de chacun des trois, et surtout, surtout, savoir que dans deux semaines, je remettrai toutes les décorations dans la boîte, boules, guirlandes de musique grésillantes et dessins moches, que je replierai les branches du sapin, que je le démonterai en trois morceaux, le remettrai dans sa boìte et dirai sereinement à l’année prochaine au bazar - pardon, à la magie, de Noël.