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En salle d’accouchement, le chaos, la vie, la liberté
 

Batailles choisies #380

Et si un accouchement devenait un moment de liberté extrême? Un moment d’intense libération du patriarcat où on se ressaisit de son corps? 🥊


 

“Pour moi, l’accouchement, c’est un acte médical, un acte qui doit être médicalisé. Je vois vraiment pas l’intérêt d’être martyr, à souffrir et à hurler comme une truie”. 

Je repense à cette conversation avec une femme eue il y a quelques annéees - à ces conversations assez fréquentes, que j’ai eues depuis que je suis mère, où revient l’argument de la médicalisation: la péridurale est un progrès, la refuser une aberration. 


Je comprends particulièrement ce discours que j’ai moi-même tenu avant mon premier accouchement, que j’ai moins tenu pour mon deuxième et que j’ai complètement rejeté pour mon troisième. Outre la peur de la douleur, et la volonté de l’éviter, il me semble que le profil des femmes dit quelque chose de ces déclarations d’intention. D’après ce que j’ai vu et ce que j’ai été aussi, ces femmes sont des bosseuses, des filles volontaires qui arrivent loin et j’ai l’impression qu’elles, comme moi il y a six ans, avions peur certes de la douleur, mais tout autant sinon plus, de devenir ridicules et même indignes. 


Car, lorsqu’on est une de ces femmes qui réussit, qui travaille, qui se contrôle pour arriver à son objectif, a-t-on vraiment envie de devenir cette pauvre nana qui crie de douleur, qui se met à quatre pattes, qui supplie qu’on l’aide, qui insulte, invective, enfin bref: qui est hors d’elle?


Vu de loin, vu de l’extérieur, une parturiente est bien indigne en effet! Par exemple, moi, n’ai-je pas crié “je ne vais pas y arriver, je ne vais pas y arriver!”? N’ai-je pas supplié à genoux “mais trouvez-moi l’anesthésiste, il est où l’anesthésiste!”? N’ai-je pas hurlé de douleur, lors du passage dans le bassin de mon troisième fils, comme jamais je n’avais hurlé, comme jamais je n’avais même imaginé que je serais capable d’hurler? Bien sûr que oui.

Vu de l’extérieur, une femme qui accouche n’est que corps, et elle est le pire de son corps. Pendant un accouchement, on transpire, on fait pipi, on pète, on fait caca. 

Cette indignité à la fois physique (la saleté) et morale (l’absence de contrôle) dit beaucoup de ce que le patriarcat a fait à notre corps, à notre regard sur notre propre corps, à l’impression que la valeur de notre corps se loge dans notre soumission à un modèle de féminité (beauté, pudeur, discrétion). Camille Froidevaux-Metterie parle dans Un corps à soi, de “l’autre moi” qu’ont toutes les femmes, qui est ce regard d’homme jugeant qu’on a absolument intériorisé.


Et si aucune femme qui accouche par voie basse ne peut échapper au pipi, caca, prout, celles qui choisissent la péridurale sauvent au moins la face: pour peu qu’elle soit posée tôt, elle nous évite de devenir cette échevelée, et nous permet de reprendre notre place de femme depuis toujours: celle qui ne dérange pas, qui ne crie pas, qui se tient.


Pour avoir vécu un bel accouchement physiologique pour mon troisième fils, je trouve que j’ai gagné à accepter d’être indigne - évidemment lorsque la femme est au centre du processus, est respectée, est entourée. J’ai remis mon corps, mes sensations au cœur du processus de donner naissance. En acceptant de pousser mon corps à bout, j’ai découvert des états corporels et psychiques extrêmes et j’ai, pour la première fois de ma vie de femme, été un corps qui ne se regarde pas être un corps qui devrait être désirable, contrôlable et aimable, un corps qui ne se surveillait pas, mais un corps acteur libre.

J’ai bêlé comme un mouton pour soulager la douleur des contractions - pas désirable, non.

J’ai beuglé sur la gentille sage-femme qui me demandait si je voulais un analgésique - contrôlable, non.

J’ai hurlé en m’écrasant la tête contre la table d’accouchement, clouée là par une douleur inconcevable - aimable, pas vraiment, non.

  

Pour moi, la salle de naissance de mon troisième enfant aura été le seul lieu au monde où j’aurai été, brièvement, libérée de la pression, des injonctions pesant sur mon propre corps.


Le seul moment où j’ai été hors de moi, mais m’étant senti en pleine possession de mon corps, je n’aurai jamais été aussi moi, librement.


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Accoucher comme une femme
 

Batailles choisies #209

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En deux mots:

L’accouchement, geste féministe ultime, où pourquoi le patriarcat ne se presse pas pour que les femmes sachent accoucher.


 

J’ai accouché trois fois: mon premier accouchement a été médicalisé très tôt dans le travail; mon deuxième m’a laissé un sentiment d’échec; mon dernier a été physiologique, sans péridurale donc, selon mes souhaits. C’est à partir de mon propre parcours dans la maternité que j’ai envie de réfléchir à ce qu’est, aujourd’hui, une naissance.

Si je voulais ramasser en une question toutes les ramifications médicales, éthiques et politiques qu’il y a derrière nos accouchements, je pourrais la poser ainsi: est-ce la même chose de faire naître au monde un nouvel humain et de se faire opérer de l'appendicite?

« Deux visions de la femme et de la naissance »




Je me souviens d’une tribune ou d’un article du Canard enchaîné qui avait fait grand bruit: une femme qui fustigeait cette nouvelle mode des féministes d’accoucher dans la douleur, entendez sans péridurale. Ridicule, non, d’avoir volontairement mal alors que la médecine moderne nous permet de ne pas accoucher dans la douleur? 

Sauf que, en termes d’accouchement, il n’y a pas que deux options qui s’offriraient aux femmes: ce n’est pas d’un côté avoir mal et de l’autre non. Cette alternative naît en réalité de deux visions de la médecine, de la femme et de la naissance. En coulisses de chacun de ces choix se jouent deux mondes différents. 




Ce long billet, et les récits de mes trois accouchements (Grand, Milieu et Dernier) disent qui je suis et comment j’ai évolué. Ils disent aussi comment mes engagements féministe et littéraire m’ont transformée, et pourquoi chaque femme, à l’aune de la nécessaire révolution féministe à venir, a les capacités de porter un regard critique sur la médecine obstétrique. 




Je tiens un journal intime depuis plus de dix ans maintenant. J’y ai décrit et raconté dans les heures ou les jours suivants chacun de mes trois accouchements. Parce que les souvenirs, même les plus forts, finissent par s’estomper ou se déformer, garder trace de ce qu’ont été ces moments exceptionnels à l’échelle d’une vie, si banals à l’échelle de l’humanité, était important.

Mais au-delà de cette fonction mémorielle, j’avais l’impression, d’abord maladroite mais désormais très claire, qu’était liés ces moments de ma vie de femme avec ma carrière et mes ambitions d’écrivaine, que ces naissances et mon travail littéraire étaient intimement mêlés: femme, féministe et écrivaine, je me suis enrichie, j’ai envie d’écrire “épaissie”, avec ces naissances.

« Pourquoi autant de péridurale? »




Quelques avertissements préliminaires: d’abord, n’ayant connu ni violences obstétricales ni césarienne, je n’en aborderai pas les enjeux. Je ne veux partir que de ma propre expérience, mon vécu d’accouchements sans difficultés majeures, mais pas sans signification. 

Ensuite, même si mon objectif, avec ce billet, est de remettre en cause la surmédicalisation des naissances et plaider pour des naissances physiologiques, ma perspective (de femme, puisque je ne fais pas partie du corps médical) n’est pas de dire qu’on doit toutes accoucher seules dans le fond d’une grange. L’avènement de la médecine obstétrique est un facteur essentiel dans la baisse de la mortalité infantile et maternelle. 

Ainsi, mon idée n’est pas de pousser dans le physiologique quoi qu’il en coûte (en vie de mère ou d’enfant), mais de me demander pourquoi on pousse autant dans la péridurale à tout prix (80% des femmes accouchent en France sous péridurale).

« De l’importance de se sentir compétente »




Il y a un mot-clé pour remettre la physiologie de la femme au centre du processus de la naissance: la compétence. Très exactement: le sentiment de sa propre compétence.

Pour réussir à accoucher sans anesthésie, pour réussir mon accouchement physiologique, j’ai dû me sentir compétente. 

C’est le premier critère. Oui, je peux accoucher de manière physiologique. Non, la péridurale n’est pas obligatoire, ni automatique. Non, je ne suis pas une petite nature, je ne suis pas forcément otage de la douleur, je peux la contrôler afin d’être active lors de mon accouchement. 

Non, je ne suis pas incapable.

Je peux y arriver.

Et je vais y arriver. 




Le sentiment de ma propre compétence de femme a été un cheminement. Il a grandi et mûri avec mes trois bébés. 

Pour mon premier, je redoutais tellement la douleur que j’ai bien vite abandonné ce plan de naissance que, pourtant, en relisant mon journal intime, je caressais déjà, bien qu’avec une maigre assurance. Pour mon deuxième, je souhaitais un accouchement sans anesthésie, mais comme je l’expliquerai, les conditions matérielles n’étaient pas réunies et je n’ai pas pu. C’est pour mon troisième que j’étais à la fois certaine de mon projet et décidée à créer l’environnement dont j’avais besoin.

Accoucher de manière physiologique a été une décision rationnelle et réfléchie.

Je me suis dit: c’est mon troisième et probablement dernier enfant. Je veux sentir ce que je n’ai pu ressentir auparavant: le passage dans le vagin, l’expulsion. Je suis attirée par tous ces témoignages de femmes qui disent que leur accouchement physiologique était merveilleux ou magique. J’ai envie, moi aussi, de connaître ça! Je m’en convaincs, les conditions sont réunies: c’est mon troisième accouchement, les deux premiers se sont faits par voie basse, sans complication. Le deuxième a été très rapide, moins de trois heures. Pour un troisième, ce sera probablement le cas.

Durant cette dernière grossesse, je m’attache donc à me sentir capable et compétente. Si je repense d’ailleurs à mes deux premiers accouchements, je m’étonne d’avoir été si ignorante. De n’avoir, à ce point, rien su. Je ne savais rien de mon propre corps, rien d’un corps parturient, n’avais pas la moindre notion de la manière dont un corps de femme est prêt pour l’accouchement, ou au contraire, de ce à quoi un corps doit se préparer. Oui, j’avais été aux cours de préparation à la naissance, mais je n’en suis ressortie qu’avec quelques techniques dont je ne saisissais ni le fond, ni les enjeux. J’avais aussi suivi un conseil entendu un peu partout et nulle part, et que je trouve aujourd’hui parfaitement inepte: surtout ne te renseigne pas trop sur l’accouchement, il vaut mieux ne pas savoir.

Je me sentais incompétente et je l’étais.

C’est un cheminement personnel vers le sentiment de ma propre capacité qui a constitué un premier pas décisif vers une naissance physiologique.

« Créons pour les femmes les conditions optimales d’accouchement  »




Sauf que ce sentiment de compétence exige plus que des encouragements, des auto-encouragements et des “vous pouvez le faire, Madame”. Il exige les conditions matérielles de la réussite des femmes. Il vient avant tout de politiques de santé et donc de politiques publiques. 

Pour l’anecdote personnelle, ma mère a accouché de mon frère aîné, en Guadeloupe à l’époque, sans péridurale puisqu’il y a bientôt quarante ans, ça n’était pas possible. Pour accompagner ma mère, il y avait une sage-femme qui tricotait assise dans un coin de la salle de naissance, disait d’une voix monocorde “ne hurlez pas, Madame, ça ne sert à rien” et qui, à l’heure pile de la fin de sa garde, s’est levée et est partie, laissant seuls ma mère et mon père.

Ce n’est pas ce que j’entends par “conditions matérielles d’un accouchement physiologique réussi”.




Je tiens à m’attarder sur ces conditions, sur les possibilités réelles qu’on donne aux femmes.

Était-il possible, matériellement et pas seulement mentalement, de choisir un accouchement physiologique pour mes deux premiers enfants?

Je dirai aujourd’hui, avec le recul, que non, que cela m’était inaccessible. 

Pour mon premier accouchement, j’ai passé de longues heures en début de travail attachée à la machine de monitoring. Or, immobilisée ainsi, en position semi-assise, les contractions sont très douloureuses alors que le travail n’est pas avancé et qu’à ce stade, de la marche, du ballon ou d’autres méthodes analgésiques non médicamenteuses font le même job. D’autant que la sage-femme s’occupe en général de plusieurs autres parturientes, elle court même de femme à femme et ne peut constituer la plupart du temps un réel soutien. Dans les faits donc, pour mon premier enfant, j’avais beau être dans une clinique qui disait dans sa brochure qu’elle respecterait mes choix, étant seule face à ma douleur, je me suis sentie rapidement incapable de la gérer, je n’ai pu échapper à la sensation de panique et je n’ai trouvé aucune autre solution que la péridurale. De la même manière, pour mon deuxième accouchement, ma sage-femme qui me regardait du coin de l’oeil sans intervenir, et surtout la salle de naissance, où il n’y avait rien d’autre que la table gynécologique ne m’offrait aucune possibilité de soulagement. J’ai été, les deux fois, mise en échec, refoulée dans une impasse et on m’a tendu l’anesthésie comme une main familière, alors qu’en réalité, je vois désormais que cette main familière est celle qui m’avait mise dans l’impasse. 

Si les conditions matérielles ne sont pas réunies, et même si on dit aux femmes qu’on respectera leur choix, on se voit forcées dans la voie d’un accouchement médicalisé. On est prises dans ce système qui a tendance, si on lui donne le doigt, à vous manger le bras: on commence par un peu d’hormones, puis un peu plus, puis on en ajoute d’autres, pour accélérer le travail, pour le mettre au bon rythme, pour que la femme s’adapte à la structure médicale, alors que ça devrait être l’inverse

Avoir un plan de naissance ne suffit pas. Il faut bien que chaque plan de naissance ait les mêmes possibilités réelles, et non théoriques, d’accompagnement.





C’est seulement pour mon troisième enfant que j’ai réussi à mettre en place ces conditions matérielles: l’accouchement s’est fait dans une clinique privée équipée de salles nature, la sage-femme et le gynécologue qui m’ont suivie pendant la grossesse ont été présents pour l’accouchement. C’est un privilège qui se paie alors qu’il devrait être accessible à toutes. Et même ainsi, j’ai dû imposer mon plan de naissance et j’ai plusieurs fois craint qu’il déraille.  

« Un accouchement sans femme »




Mais pourquoi l’accouchement physiologique est si minoritaire, semble tant à contre-courant qu’il donne l’impression qu’intérêt de la femme et intérêt de la médecine s’opposent?

Ce qui me révolte le plus a posteriori dans mon premier accouchement, et que j’ai beaucoup entendu dans des partages d’expérience avec d’autres femmes, c’est d’avoir eu l’impression de vivre une expérience hors de mon corps, d’être partie. Je ne sais pas si je peux dire que j’ai accouché. J’ai le sentiment maintenant qu’on m’a accouchée. Mais psychiquement, shootée, droguée, je n’étais plus vraiment là. 

Est-ce ça, le progrès de la médecine? Qu’on puisse faire naître des enfants presque en l’absence de la mère qui n’est plus qu’un véhicule? 

Être anesthésiée, droguée, pour se faire opérer de l’appendicite, ok; l’être pour accueillir un enfant, ce n’est pas anodin.





La question des moyens est le nerf de la guerre: là où on dépense l’argent public souligne ce qui nous importe. Et clairement, les femmes importent peu.

Où devrait être mis l’argent destiné à la médecine obstétrique? Dans les infrastructures de salles nature, dans le soutien à l’accouchement à domicile pour celles qui le souhaitent, surtout dans l’accompagnement des femmes par des sage-femmes. 

Rappelez-vous la pétition “Une femme = une sage-femme”, et le hashtag #jesuismaltraitante. Évidemment qu’une femme devrait être accompagnée, et elle seule, dans la naissance. Est-ce qu’on se voit se partager un.e chirurgien.ne, qui serait sur plusieurs opérations à la fois? Ça mettrait en danger ses patients. Eh bien, il en va de même, mise en danger physique comme psychologique, des parturientes. 





Oui, le corps d’une femme est capable d’accoucher seul. Sauf que la réalité des choses, c’est qu’accoucher seule au sens d’en pleine conscience de soi, demande d’être fortement accompagnée.






Au-delà de ce désintérêt (pour dire les choses gentiment) pour les femmes, cet emprisonnement dans une médecine productiviste est aussi et surtout le symptôme de l’emprisonnement dans une médecine patriarcale. Nous, parturientes, sommes à la fois mises sous tutelle dans une médecine patriarcale et empêchées de nous libérer, empêchées de nous considérer comme sujet à part entière.

« Accoucher comme une femme »




Un accouchement physiologique réussi, qui a mis la femme au centre de la naissance, qui en a fait un sujet, informé, décisionnaire, est un pas hors de la culture patriarcale qui imprègne tant la médecine

Un accouchement physiologique est hors du temps, plein de surprises, il rend illégitimes les roulements productivistes des équipes médicales.

Il est surtout un pas de côté pour la femme: la parturiente n’est pas une femme comme on lui a appris à l’être. Elle sort de son rôle, elle crie, elle n’est pas polie, elle ne reste pas à sa place, elle ne se laisse pas faire. La salle de naissance est un lieu qui devrait échapper aux règles du monde extérieur, celui où les femmes sont faibles, où elles dérangent. J’ai le souvenir très clair d’avoir l’impression de déranger, d’avoir peur d’abîmer quelque chose lors de mon deuxième accouchement. Mais c’est scandaleux! J’accouche. C’est l’essentiel. 

Mon gynécologue, sceptique de mon choix d’un accouchement sans anesthésie, était impressionné par ma réussite - preuve que j’ai dû faire figure d’extra-terrestre, qu’au Chili mon choix a dû être une bizarrerie suprême. Il m’a dit à plusieurs reprises que c’était un très bel accouchement. Mais ce n’est pas un hasard s’il m’a aussi dit: “dis, donc, tu as poussé des sacrés cris!”, mi moqueur, mi admiratif. 

Ben, oui, j’ai crié, et alors? Ça vous a dérangé? Pardon de vous importuner, docteur!




Il y a donc un double écueil dans cette médicalisation généralisée: ne pas chercher à donner aux femmes les moyens de leur compétence car la Médecine (entendez: les médecins, les hommes, les vrais) va s’en charger; et leur enlever, tout bonnement, si elles l’avaient. 

Pourquoi alors? Pourquoi chercher son incompétence?

Je vais expliquer en m’appuyant sur les sensations géniales que je n’ai connues que pour mon troisième accouchement, en faisant aussi un petit détour par la littérature.

Si on lit quelques récits d’accouchement de notre littérature classique (chez Flaubert ou Zola, par exemple, prochain article là-dessus bientôt), on se rend compte que les accouchements sont toujours décrits d’un point de vue masculin. Et ce qui est frappant, c’est l’insistance sur l’animalité de la femme au moment de son accouchement. La femme “met bas”, elle vit quelque chose de négatif, de dégradant pour son humanité et surtout pour sa féminité.

Pourtant, dans mon propre accouchement, et dans celui de beaucoup d’autres femmes qui l’ont bien vécu, je n’ai pas eu l’impression d’un retour à l’animalité, en tous cas pas au sens d’une diminution, d’une minoration de mon humanité.

Non, j’ai eu bien au contraire un sentiment de puissance, un sentiment de féminité extrême. Je me suis sentie immense, guerrière, forte.




Ça vous étonne, vous, qu’un système patriarcal cherche à ce que les femmes ne se sentent ni fortes ni compétentes?

Il suffit qu’on se rappelle que le verset de la Bible où la femme est condamnée à “accouch[er] dans la douleur” est le même que celui où elle est condamnée à être dominée par l’homme, et on perçoit vite qu’un accouchement qui grandit la femme n’arrange pas ceux qui veulent la dominer.




Alors, il n’y a plus qu’une chose à dire: qu’on remette la femme parturiente sur le piédestal où elle devrait être, qu’on lui donne les moyens d’être ce qu’elle est et ce qu’elle se sent être: une déesse.

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D’autres batailles ⭣

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