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Ça change tout
 

Batailles choisies #480

Sure, sex is good, but have you tried vous réveiller le matin et qu’il fasse… jour? Être maman et accrocher son espoir au temps qui passe, épisode saisonnier. 🌎


 

Il est 7 heures du matin et quelque chose… quelque chose est différent, quelque chose sort de l’ordinaire… 

Pourtant, c’est la même fatigue qui pèse sur mes paupières. 

Pourtant, c’est la même bouilloire qui chuchote trop fort comme un enfant qui ne sait pas se faire discret. 

Pourtant, c’est le même pain du petit-déjeuner, que l’un mangera en tartine, l’autre en sandwich et mon troisième mangera-t-il?

Qu’est donc ce quelque chose, qui diffère, qui se distingue, qui impose sa marque?

C’est le jour.

C’est le petit jour, plus précisément, annonçant la fin de l’hiver et le début, proche, tout proche, dans quelques semaines, du printemps. C’est le petit matin qui entre doucement par les fenêtres du salon et de la cuisine, se posant près de la bouilloire, à côté de nos tartines. Pour la première fois depuis cinq mois, lorsqu’on est assis à la table du petit-déjeuner, il ne fait pas nuit. Dehors, on voit le ciel encore blanc prendre, derrière la montagne, des tons de dragées de fête.  À 7 heures, le bleu de la nuit lambine encore mais il sait bien, et je sais bien aussi, qu’il va perdre, qu’il devra laisser sa place à l’azur éclatant qu’annonce le petit jour. Quelques rayons de soleil, timides, viendront, lorsque les assiettes seront pleines de miettes, se poser sur les feuilles du pêcher et les brins d’herbes de la pelouse.  

Alors rien n’est pareil, les mêmes verres rouges ne sont pas les mêmes, les assiettes dépareillées, les tasses à café, les tranches de pain: tout est changé. Bientôt, ce sera le printemps. Je ne commencerai plus mes journées dans le noir mais dans le jour. J’aurai, avec mes enfants, une demi-heure, puis quarante-cinq minutes, puis une heure de jour, puis deux, à passer au retour de l'école, à jouer dans le jardin, à faire du vélo dans notre rue, à aller au square. (Presque) finies les soirées froides où l’on se dispute, où l’on ne sait plus quoi faire pour s’occuper, où l’on tourne en rond et restent à l’intérieur, à attendre que la nuit soit profonde. Tout est changé.

Alors rien n’est pareil sitôt le seuil de la maison franchi. Le ciel est déjà d’un bleu radieux, de cette couleur qui m’a fait tomber amoureuse de la région centrale du Chili. Des oiseaux se posent sur les branches des platanes où je peux deviner, sous le brun, sous la peluche grise, des bourgeons. Rien, ce soir, ne sera si rude, quand on aura nos manteaux dans nos mains et pas sur nos dos, quand on pourra dire “ok, tu peux rester dans le jardin, Grand, moi je vais avec tes frères faire du vélo dans la rue”, quand je pourrai, pendant que mes garçons jouent ensemble au ballon, préparer le repas sans être vue, sans être suppliée pour une poignée de pâtes, sans être grimpée dessus. Tout est changé.

C’est donc bien vrai que nous avons passé les jours les plus courts, les nuits les plus longues, les années les plus dures. J’ai l’énergie, la belle humeur, l’espoir. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le jour qui me le crie!

Les beaux jours, ça change tout.


Batailles en vrac⭣

Batailles rangées⭣

Scroller ou écrire
 

Batailles choisies #323

Le smartphone est-il un piège à écrivain.e.s? Ou comment répondre autrement à la question: peut-on écrire lorsqu’on a des enfants? 🌞


 

Le printemps est là! 

Et avec lui, l’heure d’été!

Et avec elle, les sorties de fin d’après-midi!

Et avec elles, la brise et le doux soleil annonçant le soir à venir! 


Je suis à un square tout à côté de chez nous, avec les enfants. Ils grimpent, glissent, se disputent, se réconcilient aussitôt, se pourchassent, se violentent, viennent voir leur maman et leur bébé de petit frère assis sur un carré de pelouse, repartent en courant et en riant.

Mes pensées divaguent, les idées vont et viennent, filent, s’emmêlent, se démêlent.

À côté de moi, dans l’herbe, brille mon téléphone. 

Si je regardais les titres de l’actu, ou si je scrollais sur Twitter?

Ou bien… avoir un peu de volonté, ce serait bien aussi, non?


Souvent, on m’a posé la question: mais comment tu fais pour écrire avec les enfants?

Souvent, je me pose cette même question, qui a deux versants, le temps (que je mets de côté pour l’heure) et l’inspiration: comment faire pour trouver des choses à dire, pour regarder les enfants qui font des choses inintéressantes et merveilleuses d’enfants, et me dire, voilà, je vais écrire ci ou ça?

Encore tes obsessions, Héloïse, allez, arrête la manivelle de ton cerveau, là…

Regarde Twitter, un peu.


Mon téléphone est posé sur l’herbe. Il brille. Il me susurre que je devrais passer plus de temps à lire la presse, au lieu d’être larguée en politique et en économie. Il me susurre que peut-être on m’a tweeté quelque chose, ou que je devrais tweeter quelque chose.

Les cris menaçants de mes aînés et Dernier qui est en train de goûter une feuille morte me tirent de ce mauvais pas.

Non, stop!

Stop, les grands!

Stop, bébé!

Stop, Héloïse! Réfrène-toi. 

Il ne se passe rien dans cette petite boîte noire ou alors il se passe trop de choses dans la vitrine des réseaux sociaux, belle autant qu’artificielle.

Je n’ai pas grandi avec un téléphone et je plains les générations qui se construisent avec. J’ai eu un smartphone très tard avec ses avantages, parler avec sa famille à l’autre bout du monde, et ses inconvénients: un smartphone est un puissant anesthésiant. Il écrase les pensées, les sentiments, il divertit au lieu de faire passer le temps.

Il m’empêche de penser à un peu tout et un peu rien, de laisser les idées et les mots s’agiter dans ma tête, comme les flocons blancs d’une boule à neige, et se poser - voilà, c’est ça qu’il manque à cette phrase oh c’est rigolo ah pas mal cette idée!

Il se passe quoi dans le vrai monde, loin de la boîte noire, dans celui de la routine, des enfants, au square? Grand veut monter en premier sur le toboggan et montre à son frère un camion, là-bas, regarde, pour le distraire - sale gosse. Milieu se met à essayer de dévisser un banc - s’il ne devient pas inventeur, lui, j’en perdrai mon latin. Grand s’écrie qu’il y a un camion-toupie, un vrai cette fois - bon, il est aussi capable de faire plaisir à son frère, ce n’est pas un psychopathe. Dernier plonge ses petits poings dans les brins d’herbe et découvre une sensation merveilleuse.

Il ne se passe pas grand chose, juste assez. Il ne se serait rien passé si j’avais scrollé comme une malheureuse.    

Une forme d’oisiveté, de lenteur, de retraite du monde, m’est nécessaire pour écrire. Regarder plutôt que participer, penser plutôt que dire, endurer plutôt que réussir.

Vade retro, smartphone!

Reste là-bas!


Écrivaines génitrices, écrivains géniteurs, vous voulez écrire?

Posez votre téléphone et allez avec vos enfants vous allonger dans l’herbe.


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