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Mes enfants ne me manquent pas
 

Batailles choisies #678

Alerte mauvaise mère. Avis de tempête sur la maternité béate. Tsunami de non-glamour et de non-paillettes: être mère, c’est bien, être seule, c’est mieux. 🌀


 

Quand je ne suis pas avec mes enfants, eh ben… ils ne me manquent pas. 

Pas du tout.

Je n’ai pas hâte de rentrer.

Pas du tout.

Je ne me demande pas s’ils pensent à moi.

Pas du tout.

D’ailleurs, je ne pense pas à eux. 

Pas du tout.


Mauvaise mère.

Encore une Médée, celle-là.

Tes enfants devraient être tout pour toi!

Et après on s’étonne que les enfants d’aujourd’hui n’aient pas d’attache affective.


Il y en a, des mères qui disent que leurs enfants leur manquent terriblement quand ils sont en vacances chez Papi ou à la mer. Et c’est très bien. Il y a des mères qui appellent leurs enfants, qui prévoient des rendez-vous téléphoniques, qui leur envoie des textos, des cartes, qui se demandent ce qu’ils font. 

Mais moi, ben, en général, non.

J’ai trois enfants.

Mais j’aurais pu n’en avoir aucun.

Je suis heureuse d’être mère.

Mais j’aurais pu ne pas l’être et être tout autant heureuse.


Si, bien sûr, parfois, j’ai pensé à eux pendant ce court séjour en France.

Bien sûr, là, je suis à Paris, et j’aimerais qu’eux aussi voient ce que je vois. Je regarde ce square et je me dis que si j’avais été avec les enfants, je les y aurais emmenés. Ils auraient joué comme des fous. Je m’imagine avec mes garçons, ballotés dans le métro, je rêve de les voir émerveillés par le Grand Palais, par Orsay ou par les jolis bus de France. Ce qui me manque, c’est le partage, c’est l’échange, ce sont les moments de douceur, de tendresse, d’apprentissage.

Sauf que ma vie quotidienne consiste bien davantage à n’avoir d’échange avec personne et ne donner ou recevoir de l’amour qu’en coup de vent. Enfin, c’est une impression que j’ai, si souvent. Seule en France, je me sens incroyablement libre, riche de projets et de désirs… que bientôt la routine étouffera. 

Le retour sera difficile: je ne serai plus écrivaine d’abord, sœur d’abord, fille d’abord, libre pour un café, dispo pour déjeuner ou dîner d’abord. Non. Je serai mère, d’abord.  


Atterrissage forcé, retour à la maison, à la vraie vie, cœur lourd. 

Sauf que, oh mais que vois-je, là-bas, qui revient de l’école?

C’est Grand, avec ses longs cheveux et sa démarche sautillante!

C’est Milieu, avec son sourire ravageur et son air coquin!

C’est Dernier qui court vers moi en hurlant comme le petit cro-magnon qu’il est.

Ce sont les mots doux qu’ils me disent avec leurs bisous: tu m’as manqué, Maman. Je t’aime fort. 

Je suis heureuse de vous revoir, mes chéris. 


Atterrissage-baiser qui ne dure pas: mais que se passe-t-il, charme déjà rompu?

C’est Milieu qui pleure parce qu’il préférait le cadeau de Grand.

C’est Grand qui dit que j’aurais dû rester en France, d’abord.

C’est Dernier qui exige qu’on se dépêche de lui monter son Playmobil. 


C’est bon. J’ai atterri.

Fin du voyage.

Retour en Materniland. 

Mais ça va. Ça fait aller.


Batailles en vrac⭣

Batailles rangées⭣

SWAP
 

Batailles choisies #677

Cherche appartement, maison (ou mari?) pour les vacances. 🔁


 

Il est 15 heures et le soleil inonde l’appartement.

Je viens de rentrer d’un déjeuner avec un ami.

J’ai rendez-vous dans une heure avec une lectrice.

Un thé fumant, un livre ouvert et du temps libre m’attendent dans un doux silence. 


J’ai dit à qui me posait la question que vraiment, la vie que j’ai au Chili est géniale, qu’elle est très douce, très privilégiée, que je ne peux pas rêver mieux.

C’est vrai.

Mais… je peux rêver, non?

Je rêve à la vie parisienne que j’ai pour quelques jours. Imaginez un peu: je suis en vacances, je revois des amies, des anciens potes, je rencontre des lectrices de longue date, je parle de mon dernier livre, j’écoute des parents en parler avec un tel amour, un tel enthousiasme que j’en ai les larmes aux yeux, je flâne dans Paris, je retrouve ma sœur adorée. C’est une telle parenthèse dans ma vie à bout, à bout de souffle, à bas-bout, en bout de course. C’est… merveilleux, de douceur, de temps, d’oisiveté déculpabilisée.   


Eh sinon, ma soeurette, euh, ça te dirait pas qu’on échange de vie? Qu’on swappe nos vies, oh, juste pour des vacances, hein! Tu viens au Chili et tu t’occupes des enfants pendant une semaine? Et moi je reste dans ton appartement et je fais des expos, je vois de gens et je bois des cafés en terrasse? Ah, non, mais t’inquiète, je te prends pas ton mec, hein. Chacun le sien: moi je viens ici avec Mari, et vous, vous allez tous les deux à la maison et vous restez avec les enfants!

Non? Tu es sûre?

Attends, qu’est-ce que je pourrai te dire pour te convaincre… Euh… ben écoute, regarde, si tu restes pendant une semaine avec les petits, tu vas courir toute la journée après les enfants, tu vas passer ta journée à penser au prochain repas, toi et ton mec vous allez à peine vous parler et vous allez passer votre temps à lancer des ordres ou des reproches, vous allez devoir séparer mes trois enfants en deux groupes dans l’espoir de survivre jusqu’à la fin de la journée, en tirant à la courte paille pour le groupe le plus galère des deux et la sortie la moins fun des deux, tu vas aussi régler des disputes pour des camions rouges, des verres bleus ou des crayons verts, tu vas être patiente, super patiente, jusqu’à ce que tu exploses parce qu’on te fait tourner en bourrique à force de te demander d’être patiente, tu vas avoir des piles de linge à laver, tu vas menacer les enfants d’une visite des pires trolls, sorcières et démons issus toutes les mythologies du monde s’ils ne se lavent pas bien les dents, tu vas terminer la journée avec la tête en citrouille, les pensées en berne et l’âme en dépression et vous allez vous écrouler à 21 heures sur le lit. 

Non? Toujours pas?

Ils te feront aussi les plus doux bisous du monde, des câlins plein de tendresse.

Non?

Ah… dommage, je pensais t’avoir bien vendu la parentalité…       


L’herbe est toujours plus verte dans le jardin des voisins. Avec cette liberté, avec ces vacances, évidemment que ma vie quotidienne si harassante ne me fait pas rêver. Bien sûr que tout ce que je vis ici n’est qu’une parenthèse et qu’il me faut prendre garde aux illusions de la reconnaissance, de la douceur de vivre, de la liberté d’une vie sans contraintes.


Je me suis ressourcée, j’ai retrouvé de l’énergie, j’ai vu la lumière… et aimerais bien la revoir avant les calendes grecques. C’est un tel soulagement de faire un pas de côté sur sa vie que je me rends compte qu’on en a vraiment besoin, alors que ni Mari ni moi ne l’avons jamais fait. Pas assez de soutien familial, une grande réticence à faire appel à des services de garde parce qu’on s’inquiète d’une galère, je ne sais pas quoi à vrai dire qui nous retient, et nous empêche.

Alors, j’insiste, cherche appartement ou maison pour échange pour les vacances. Notre maison est très agréable - enfants inclus (dans la maison, pas l’agréable).


Batailles en vrac⭣

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